Demain, vers une démocratie alimentaire ?

01/11/2020     MARKETA BRAIN , KEVIN CERTENAIS

    Demain, vers une démocratie alimentaire ?

    Le développement des tiers-lieux alimentaires et la sécurité sociale de l’alimentation comme pistes concrètes à explorer.

    Regard croisé de deux associations : Madabrest association brestoise porteuse du projet de la MAD, tiers-lieu de la démocratie alimentaire et Réseau Salariat à travers la réflexion sur une Sécurité Sociale de l'Alimentation.

    L’épidémie de la COVID19 est un miroir de notre société, faisant exploser les idées reçues sur la stabilité et la solidité de notre système alimentaire. Nous venons de vivre un bouleversement majeur, tant social, qu’économique. C’est un bouleversement de nos certitudes. Le modèle économique capitaliste fondé sur la recherche du profit, a mis en place une industrie agroalimentaire ultra-productive, exploitant les humains, détruisant l’écosystème, soutenue et encouragée par les politiques de subventions européennes et nationales.

    Alors que l’accès à l’alimentation est un droit, la pandémie, le confinement, nous ont fait nous rendre compte qu’il n’est pas réel pour l’ensemble de la population.

    Avec la fermeture des lieux de restauration collective, le non accès aux allocations chômage pour une partie des personnes privées d’emploi (intérimaires, autoentrepreneurs…), une part bien plus importante et malheureusement encore croissante de la population a dû recourir à l’aide alimentaire. Aujourd’hui, ce sont 8 millions de personnes qui dépendraient de cette aide.

    Toute cette réalité est difficile à admettre. Elle pose la question de la capacité de notre système alimentaire à répondre aux chocs, se relever et assurer la justice sociale dans l’accès de toutes et tous à l’alimentation.

    Elle pose également l’urgence de penser des alternatives en termes d’organisation nouvelle de la société. L’épidémie du COVID 19 nous incite à employer d’autres méthodes de coopération pour produire et distribuer la nourriture dont nous avons besoin mais aussi et avant tout de mobiliser d’autres parties prenantes, d’ouvrir le débat, d’ouvrir la recherche des solutions à d’autres acteurs, d’autres mangeurs… à nous toutes et tous, citoyennes et citoyens.

    Et les territoires bougent déjà. Localement, à une échelle micro-économique, des habitant-es, des collectifs de travail se mobilisent, créent des solutions d’approvisionnement alimentaires concrètes, faisant la part belle aux productions locales, de saison, issues des modes de production respectueux des femmes et des hommes, de l’animal et de la nature.

    Globalement, à une échelle macro-économique, nous ne partons pas de rien non plus… Nous nous inscrivons dans une histoire longue des conquêtes sociales – qui ont permis de reconnaître du travail ne mettant pas en valeur du capital – c’est l’exemple des fonctionnaires, des retraités, de la copropriété d’usage des moyens de production avec les coopératives de salarié-es, ou encore de reconnaître la santé comme un droit accessible à toutes et tous, universel.

    Nous pouvons nous inspirer des déjà-là, apprendre de ce qui vient de se passer pour poser de nouvelles bases du vivre ensemble, mettre en commun, croiser, innover… Nous pouvons, nous devons, être audacieux. Nous pouvons expérimenter la notion de démocratie alimentaire, et revendiquer son expression concrète dans les chantiers majeurs comme celui de la création d'une sécurité sociale de l'alimentation ou encore dans l’essaimage des tiers-lieux alimentaires, agoras démocratiques pour repenser collectivement notre système alimentaire.

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    Un dossier rédigé à deux mains par Marketa Brain et Kevin Certenais pour la Revue Tiers-Lieux (n°6, 11/2020) à retrouver en fichier PDF ci-dessous.

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