Automnales2021 - Atelier 3 - Monnaie et Sécurité Sociale de l Alimentation
Automnales de Réseau salariat 2021,du 30 octobre au 1er novembre 2021, à Lille,organisées par le groupe local Nord – Pas-de-Calais,sur initiative du groupe thématique économie du salaire à vie.
Monnaie & Sécurité sociale de l’alimentation1
Atelier animé par :
Chrystelle, du groupe thématique sécurité sociale de l’alimentation (ssa).
Bernard Q., du groupe thématique économie du salaire à vie.
Durée : 1h.
Matériel : pc + grand écran.
Méthode : présentation et discussion autour des schémas ci-dessous, diffusés sur grand écran.
– Objectifs de l’atelier.
Il s’agit ici de réfléchir à un schéma monétaire de fonctionnement de la ssa dans le capitalisme, mais aussi à un schéma monétaire de fonctionnement de la ssa dans le monde du salaire à vie.
Le gt ssa a construit plusieurs schémas.
Le gt économie en avance un autre, qui transpose à la ssa les principes de la proposition de fonctionnement général de l’économie du salaire à vie présentée dans les deux ateliers précédents.
L’atelier présente et discute les différents schémas du gt ssa.
Le schéma proposé par le gt économie est présenté à une autre occasion.
1 Ce compte rendu a été établi à partir de notes prises sur le vif durant l’atelier, nécessairement partielles et incomplètes. Des codes temporels vous permettront de vous référer à l’enregistrement complet de l’atelier.
– Présentation par les intervenants, et échange avec l’assemblée.
– Le monde du Salaire à Vie : premier schéma du GT SSA .
Chrystelle. – Le fonctionnement global du monde du salaire à vie implique au moins deux types de flux monétaires : les versements de salaires aux travailleur·euse·s par les caisses de salaires ; et les achats de la production par les travailleur·euse·s, décomptés dans les caisses de salaires.
Bernard Q. – Ce schéma ressemble beaucoup à celui que nous avons présenté hier. Le seul élément que l’on voudrait y voir apparaître est la création monétaire : d’où vient la monnaie ?
Chrystelle. – Ce sont les caisses de salaire qui créent la monnaie.
Bernard Q. – On peut s’en douter, à la lecture du schéma, mais ça n’y est pas indiqué.
– Le monde du Salaire à Vie : deuxième schéma du GT SSA .
Chrystelle. – Nous avons ensuite cherché à compléter ce premier schéma simplifié : il y manque les entreprises ; comment s’y insèrent-elles ? Ceci implique au moins deux types de flux monétaires supplémentaires.
– Les caisses de salaires versent les salaires aux travailleur·euse·s, qui achètent la production aux entreprises, lesquelles reversent leur chiffre d’affaires aux caisses par cotisation. Les entreprises s’insèrent comme intermédiaires entre les travailleur·euse·s et les caisses de salaires pour le reversement de la monnaie créée, ce qui fait apparaître un nouveau flux monétaire : les cotisations.
– Les entreprises ont par ailleurs aussi besoin de monnaie pour effectuer des achats de moyens de production. Il faut donc ajouter un nouveau type de flux monétaires : les subventions accordées par les caisses d’investissement aux entreprises, finançant leurs investissements. Ces subventions sont à leur tour financées par les cotisations.
Bernard Q. – Ce deuxième schéma ressemble plus au modèle de Bertrand Bony qu’à la proposition que nous avons faite hier, puisque l’on y retrouve un financement de l’investissement : la subvention, tandis que nous avons supprimé tout financement de l’investissement.
– Le monde du Salaire à Vie : troisième schéma du GT SSA .
Chrystelle. – Les entreprises peuvent aussi financer elles-même leurs investissements (auto-financement), et ont besoin de monnaie pour acheter leurs consommations intermédiaires. Ainsi s’ajoutent deux nouveaux types de flux monétaires : des flux entre les entreprises, pour les achats de consommations intermédiaires ; et des flux pour l’auto-financement.
Bernard Q. – Je voudrais demander à la salle si vous avez des commentaires à faire sur la comparaison entre ce schéma et la proposition faite hier, notamment sur l’auto-financement.
Hélène. – Hier, vous avez proposé de considérer que la production n’a besoin que de travail, que les moyens de production et les consommations intermédiaires dont les entreprises ont besoin ne sont que du travail, et qu’il n’y a donc pas lieu de les acheter : les entreprises devraient se les échanger sans monnaie. Pourquoi ce qui vaut pour la production ne vaut-il pas également pour la distribution de la production, alors que ce que les personnes achètent est aussi le fruit du travail ?
Bernard Q. – Nous partons du salaire à vie, donc décidons de conserver la monnaie. Or, si on fait le choix de conserver la monnaie, alors il faut bien que les salaires servent à quelque chose, c’est-à-dire qu’il y ait des ventes et des achats. Et, si nous conservons la monnaie, c’est notamment pour garantir une diversité de choix aux citoyen·ne·s dans la distribution de la production finale.
Par ailleurs, les transferts de valeur économique entre les unités de production (up) pour les productions intermédiaires et de développement ne sont pas si différents des flux monétaires entre les citoyen·ne·s et les up pour la production à vendre : la monnaie exprime de la valeur économique, et les transferts de valeur économique sont comptabilisés dans une unité de compte qui est celle de cette monnaie.
Mais cela simplifie beaucoup les échanges inter-up et la gestion de la masse monétaire de ne pas avoir des flux monétaires en tous sens et sur une longue durée au sein de la chaîne de production. Les up n’ont plus à gérer de monnaie, ne peuvent plus en manquer, et n’ont plus à attendre d’en avoir suffisamment pour leurs achats. Il n’y a plus de situation où la monnaie créée revient pour destruction plus d’un an après sa création en raison de la longueur de la chaîne de production : en limitant l’usage de la monnaie à la distribution de la production finale, on récupère la monnaie très rapidement pour assurer l’égalité entre la création et la destruction monétaire.
Cyril (gt économie). – Je voudrais présenter une question politique soulevée par l’institution auto-financement. Dans la proposition de B. Bony, son montant est déterminé par un pourcentage de la valeur ajoutée produite par l’up ; il est donc proportionnel à la taille de l’up, et les plus grandes up ont ainsi accès à plus d’auto-financement que les plus petites. Ceci soulève une question politique : à partir du moment où l’on démocratise l’investissement, comme Réseau salariat propose de le faire par une subvention financée par une cotisation inter-professionnelle, veut-on par ailleurs conserver une institution : l’auto-financement, par laquelle chaque up finance elle-même, par son travail, son propre financement, ou bien veut-on démocratiser complètement l’investissement ?
Chrystelle. – Pour ma part, je pense qu’il faut faire coexister les deux modes de financement : un financement démocratiquement décidé, et une marge de manœuvre pour chaque up, de façon à ce que le collectif de travail ait un pouvoir de prise de décision et une autonomie.
Bernard Q. – Je suis d’accord qu’il faille une autonomie relative de chaque up pour une partie de ses productions de développement, qu’elles ne soient pas dépendantes des décisions des comités économiques pour la totalité de leurs productions de développement. Mais on pourrait l’obtenir par un autre dispositif que l’auto-financement. Le problème posé par l’auto-financement me semble être, non celui entre une décision collective et une décision individuelle de l’investissement, mais un problème de gestion de la masse monétaire : l’auto-financement immobilise de la monnaie pendant plusieurs mois ou années, puisque l’up doit accumuler de la monnaie (capitalisation) le temps d’en avoir assez pour financer les productions de développement dont elle a besoin. Or, l’immobilisation de cette monnaie empêche d’autres up de l’utiliser pour avoir accès à des productions de développement. En supprimant le financement de l’investissement, nous supprimons ce problème. Il reste à organiser un autre dispositif conférant à chaque up une autonomie sur une partie de ses productions de développement, au moins pour la maintenance des moyens de production.
Daniel (ssa). – Y a-t-il besoin d’auto-financement monétaire pour maintenir cette autonomie des up ? L’up décide ce qu’elle commande, et à qui. Pourquoi passer par la monnaie ?
Bernard Q. – Non, il n’y en a pas besoin, et c’est ce que notre modèle propose, même s’il nous faut encore travailler sur la démocratie économique. Par ailleurs, nous avons accordé une autonomie aux up pour les productions intermédiaires, qui ne sont pas décidées par les comités économiques.
Question. – Le droit de tirage est-il illimité pour une entreprise ?
Bernard Q. – Aucun droit de tirage ne peut être illimité, puisqu’il est toujours limité par la production disponible, qu’il s’agisse du droit de tirage des up sur les productions intermédiaires et de développement, ou du droit de tirage des citoyen·ne·s sur la production finale : si tout le monde veut acheter une voiture au même moment, il n’y aura pas assez de voitures pour tout le monde. Il y a donc toujours un équilibre entre la quantité de produits disponibles et la quantité que l’on peut acquérir.
Laura (ssa). – Ce schéma ne fait pas figurer de services publics ou de caisses de « gratuité ». Il faudra des flux monétaires pour salarier les travailleur·euse·s de ces secteurs, et des subventions pour le fonctionnement de ces secteurs. Et la ssa inclura de tels services de gratuité, comme des cantines.
Chrystelle. – C’était un exercice de simplification, d’où cette absence ; et on les introduit plus tard dans un autre schéma.
Laura. – D’accord, mais il faut montrer qu’il est possible de faire de la « gratuité » dans une économie, et que cela suppose de la monnaie pour les salaires et les subventions.
– Le monde du Salaire à Vie : interrogations .
– La SSA dans le capitalisme , SANS services publics : quatrième schéma du GT SSA .
Chrystelle. – Si, maintenant, on imagine le circuit monétaire de la ssa dans le capitalisme, il est nettement plus complexe, présente un plus grand nombre de types de flux monétaires – ce pourquoi nous avons préféré le laisser tel quel, et ajouter les services publics dans un autre schéma.
Une cotisation inter-professionnelle des entreprises extérieures à la ssa permet de financer les salaires à vie des travailleur·euse·s des entreprises conventionnées par la ssa, ainsi que les subventions qui permettent à ces entreprises conventionnées d’acheter des moyens de production à des entreprises extérieures à la ssa.
Les habitant·e·s achètent la production alimentaire ssa aux entreprises conventionnées, lesquelles conservent une partie de la monnaie issue de ces achats pour leur auto-financement et pour acheter des consommations intermédiaires, soit à d’autres entreprises conventionnées par la ssa, soit à des entreprises extérieures à la ssa. Elles reversent le reste aux caisses de ssa par cotisation.
La cotisation inter-professionnelle permet également aux caisses de ssa de verser des prestations sociales aux habitant·e·s : les allocations fléchées sur la carte vitale, grâce auxquelles les habitant·e·s peuvent acheter des productions alimentaires dans les entreprises conventionnées.
– La SSA dans le capitalisme , AVEC services publics : cinquième schéma du GT SSA .
Chrystelle. – En ajoutant les services publics de l’alimentation, dont la restauration collective, on ajoute aussi les flux monétaires nécessaires au fonctionnement de ceux-là : une dotation de fonctionnement, allouée par les caisses de ssa, qui permet à ces services publics d’acheter les consommations intermédiaires nécessaires à leur fonctionnement ; et, si la production des services publics n’est pas toujours gratuite, des achats à moindre coût par les habitant·e·s.
Bernard Q. – Ce qui m’intéresse, c’est toujours de savoir d’où vient la monnaie et comment elle est utilisée. D’où vient la monnaie qui finance les salaires et toutes les subventions de la production alimentaire subventionnée ? D’une cotisation inter-professionnelle sur la valeur ajoutée des entreprises. Comment cette monnaie est-elle utilisée ? Elle finance toute la production de la ssa. D’où vient la monnaie des allocations fléchée versées sur la carte vitale ? Des mêmes cotisations. La question se pose donc de savoir si les cotisations sont suffisantes pour financer à la fois les salaires et les subventions, c’est-à-dire la production ssa ; et à la fois les allocations fléchées, c’est-à-dire distribution ssa. Dans le gt économie, il nous semble que, dès lors que tous les salaires, tous les investissements et toutes les consommations intermédiaires de la filière ssa sont assurés, la production de la filière est totalement financée ; il n’y a donc plus besoin de l’acheter pour la financer. Par conséquent, on donne aux citoyen·ne·s, non de la monnaie, mais un droit de tirage sur la production ssa. Ce droit de tirage est exprimé en euros pour donner à chaque personne le choix de la production alimentaire qu’elle tire, parce que certaines préfèrent les pêches, et, les autres, les pommes : chaque personne peut acquérir une production alimentaire dont la valeur est, par exemple, de 150 €, qu’il s’agisse de pêches ou de pommes. Si on avait voulu donner à tout le monde un panier alimentaire identique, comme dans une amap, alors il n’y aurait pas eu besoin d’exprimer monétairement ce droit de tirage pour distribuer ce panier unique : on l’aurait directement distribué à chaque personne. Dès que la production est financée, la ssa la distribue comme elle veut, et les unités monétaires sur la carte vitale ne sont là que pour garantir du choix aux consommateurs.
Laura. – En disant que les unités monétaires sur la carte vitale ne sont qu’un droit de tirage, veux-tu dire que la distribution alimentaire est non-marchande ?
Bernard Q. – C’est dur à dire, et je ne suis pas sûr qu’il faille penser en ces termes… Il y a un marché dans la mesure où on laisse à chacun·e le choix de faire son propre panier alimentaire, où on n’impose pas à tout le monde le même panier. Mais ça n’a rien à voir avec un marché capitaliste.
Laura. – La valeur créée par les entreprises conventionnées part-elle dans les caisses ?
Bernard Q. – La valeur économique créée par les entreprises conventionnées est égale aux salaires, et uniquement aux salaires, donc…
Laura. – Ça dépend de la fixation des prix, non ?
Bernard Q. – En effet. Si on cherche à faire des profits en vendant la production, alors la valeur ajoutée des entreprises est supérieure aux salaires. Si, au contraire, on vend la production au prix coûtant, alors la valeur ajoutée des entreprises correspond uniquement aux salaires, puisque, ce que cela coûte de produire ceci, ce sont uniquement les salaires. Ceux-ci étant déjà payés, il n’y a rien qui puisse retourner dans les caisses. C’est une question de principe : le montant de l’allocation fléchée de 150 € versée aux citoyen·ne·s sur la carte vitale est calculé en fonction du prix coûtant ; si, donc, on veut permettre à la population d’avoir accès à 150 € de production alimentaire, alors il faut vendre à prix coûtant ; si on vend plus cher, ces 150 € de monnaie ne permettrons aux personnes d’accéder qu’à une production alimentaire dont la valeur économique sera plus faible, par exemple de 120 €.
Chrystelle. – Il y a d’autres possibilités que le prix coûtant. Le but général est de distribuer la production, et le prix ne sert qu’à cela. Mais on n’est pas obligé de recourir au prix coûtant, on peut calculer le prix autrement. On peut aussi se passer de prix, utiliser d’autres règles.
Yann (ssa). – Si on augmente le prix d’un article d’un euro, la monnaie partira des caisses via la carte vitale de la personne qui achète, et cette monnaie reviendra aux caisses par la cotisation versée par les entreprises conventionnées. Cet euro tourne en rond, et pourrait donc être d’une autre monnaie, ou pourrait être retiré pour qu’il n’y ait pas de profits.
Il me semble que, pour discuter de la formation des prix dans la ssa et bien nous comprendre les un·s les autres, il faut distinguer trois situations : on ne forme pas les prix de la même façon selon que la ssa se place dans une économie du salaire à vie ; qu’elle est installée dans le capitalisme, mais gérée selon des critères communistes ; ou qu’elle est en phase d’installation et d’extension dans le capitalisme. Dans une phase d’installation, par exemple, la question se pose de trouver des moyens de saisir une plus grosse part de valeur ajoutée pour étendre la ssa et réduire l’agro-business, et on pourrait alors vouloir à cette fin vendre à des prix supérieurs au prix coûtant.
Bernard Q. – Je voudrais revenir sur le prix coûtant, de façon plus claire, je l’espère. Globalement, ou au niveau macro-économique, la valeur économique de toute la production alimentaire ssa est égale à ce que les caisses de ssa versent aux entreprises conventionnées pour produire cette production alimentaire, c’est-à-dire à la somme des salaires et des investissements : disons cent-vingt milliards d’euros. Pour que la population puisse donc acheter toute cette production, il faut verser sur les cartes vitales l’équivalent de ces cent-vint milliards : disons cent-cinquante euros par personne, – et la vendre à prix coûtant. Si, maintenant, on vend cette production au-delà de son prix coûtant, c’est-à-dire au-delà de la somme des salaires et des investissements, alors les cent-cinquante euros versés sur la carte vitale ne permettront pas à chaque personne d’acheter sa part de la production ssa : chacun·e devra compléter de sa poche. Dans ce cas, les caisses ne sont pas seulement financées par la cotisation des entreprises : elles le sont aussi par chaque personne, de sa poche.
Julien. – Qu’entendez-vous par accès à moindre coût ?
Chrystelle. – Tandis que les entreprises conventionnées « marchandes » vendraient leur production à un prix calculé, qui serait le prix coûtant, les services publics les distribueraient à un prix fixé par décision politique, inférieur au prix coûtant : c’est un prix subventionné, qui pourrait même être un prix symbolique à un euro, voire être nul. Ce serait à la décision collective de déterminer, pour chaque service public, le tarif qui y sera pratiqué.
Julien. – Serait-il payé par la carte vitale ?
Bernard Q. – C’est possible, mais pas nécessairement, notamment si la production est gratuite.
Cyril. – Pour bien exprimer que ce qu’il y a sur la carte vitale n’est qu’un droit de tirage, et pas de la monnaie en euros, on peut dire que ce ne sont que des jetons, qui ne peuvent être utilisés que pour la distribution d’une partie de la production alimentaire, et une autre partie entièrement socialisée serait accessible sans jetons, comme les cantines et autres services publics.
Alexandre (gt économie). – Pour illustrer la différence entre le circuit monétaire capitaliste et le circuit monétaire ssa, on peut dire que la situation de la carte vitale de la ssa face au capital est la même que celle des bons de travail de Wörgl face à la monnaie autrichienne dans La Monnaie miraculeuse : c’est une bulle communiste dans le capitalisme, une monnaie parallèle. Il y a même moyen d’étendre cette bulle aux productions intermédiaires des up de la ssa et au-delà de la filière de l’alimentation, pour éviter d’ouvrir la ssa aux entreprises capitalistes, comme la sécurité sociale de la santé l’est malheureusement, notamment pour le médicament, parce que toute la filière n’y est pas incluse.
Anne. – Le panier alimentaire me pose problème : il ressemble à un j’ai cotisé, donc j’ai droit à un panier, à un droit à une consommation individuelle.
Yann. – Sauf qu’il y aura une dimension démocratique, par laquelle les citoyen·ne·s du bassin participeront à l’élaboration du panier, donc à la production. Ce n’est donc pas un droit individuel de pur consommateur. C’est un droit de participer à la décision sur la production du panier.
Bernard F. – À l’initiative de camarades d’Alternatiba Saint-Étienne, j’ai eu un débat avec Thomas Coutrot, qui réfléchit avec Bruno Théret sur des moyens de paiement non-convertibles en euro à mettre en place dès aujourd’hui en régime capitaliste1. On se trouvait d’accord sur une hausse des bas salaires et sur une conversion d’une partie des hauts salaires en monnaie marquée non-convertible – pour que le dispositif soit universel –, qui solvabilise la population en matière alimentaire et assure la production alimentaire nécessaire, selon le processus de création-destruction de cette monnaie. Il est intéressant que des spécialistes de la monnaie – comme Bruno Théret – soient d’accord avec nous : nous n’errons pas, et c’est bien plus intéressant que mon ancienne proposition de non-remboursement de dettes des entreprises pour financer la cotisation. Une monnaie marquée non-convertible fonctionnant, certes dans le cadre du capitalisme, mais sur le mode communiste que vous avez présenté hier, voilà qui me semble être une proposition passionnante.
Anne-Sophie (ssa). – Sait-on combien de travailleur·euse·s on peut payer ? Ce serait bien de pouvoir le dire lorsque l’on avance notre proposition de ssa.
Bernard Q. – Il y a un peu plus d’un an, on avait calculé que l’on pouvait, avec cent-vingt milliards, financer tout ce que l’on voulait financer : salaires, consommations intermédiaires, et investissements, dont achat du foncier ; agriculture, transformation, transport, lieux de vente, restauration, etc.
Bernard F. – Aujourd’hui, la filière de l’alimentation est de deux-cent-quarante milliards. Il ne s’agissait donc pas, avec les cent-vingt milliards, d’assurer l’exhaustivité, de sortir toute la production alimentaire du capitalisme, parce que la production alternative n’en est pas encore capable. Il s’agissait, par une institution macro-économique, de sortir les alternatifs de la marginalité – laquelle leur fait souvent jouer malgré eux le rôle de caution du capitalisme –, et d’enfoncer un coin qui mette l’agro-business en péril, pour créer une aspiration des travailleur·euse·s de l’agro-business à réorienter leur production et à la sortir du capitalisme. À cet égard, la hausse des bas salaires et la conversion d’une partie des hauts salaires en monnaie marquée non-convertible sur le modèle présenté hier me semble une très bonne idée, qui établirait une très bonne dynamique.
1 Thomas Coutrot & Bruno Théret, « Système fiscal de paiement complémentaire : un dispositif pour renverser l’hégémonie », Revue française de socio-économie, 2019/1, n°22, pp. 163-170, en libre accès en ligne.
– Une SSA NON - MARCHANDE dans le capitalisme : sixième schéma du GT SSA .
– La SSA dans le capitalisme : interrogations .
– Rencontres gt ssa et gt économie.
La discussion sur le circuit monétaire de la ssa s’est poursuivie les 1er et 2 novembre entre certains membres présents du groupe gt ssa et du gt économie du sàv, et les participants aux automnales intéressés par la question et disponibles. C’est à cette occasion que le schéma monétaire proposé par le gt économie du sàv pour le fonctionnement de la ssa fut présenté et discuté.
Ces discussions relevant à la fois d’un travail en cours et de débats internes à Réseau salariat, ils ne seront pas publiés. Les intervenants des gt économie du sàv et ssa restent toutefois ouverts à des discussions externes sur ces questions.
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1 Ce compte rendu a été établi à partir de notes prises sur le vif durant l’atelier, nécessairement partielles et incomplètes.
2 Thomas Coutrot & Bruno Théret, « Système fiscal de paiement complémentaire : un dispositif pour renverser l’hégémonie », Revue française de socio-économie, 2019/1, n°22, pp. 163-170, en libre accès en ligne.
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