Pour une Sécurité Sociale de l’Éducation à la Co-Responsabilité et à L’Emancipation

27/08/2024     PATRICK , LE GROUPE MIDI-PY , LE GROUPE EDUCATION

    Pour une Sécurité Sociale de l’Éducation à la Co-Responsabilité et à L’Emancipation
    Résumé :

     Proposition de création d’une Sécurité Sociale [1] à la Co-Responsabilité et à l’Émancipation

    - qui agglomère tous les budgets éducation, de la petite enfance à la formation professionnelle

    - par une cotisation sur la valeur ajoutée de 10,5 %, géré dans le cadre du Régime Général, par des institutions démocratiques

    Éventuellement :

    - en faire un droit universel à l’Éducation, en attribuant à tous une somme de 700€/mois (jusqu’à 14 ans, cette monnaie marquée serait sous la responsabilité des responsables légaux)

    - à utiliser chez des professionnels (ou entités de formation) conventionnés, c’est à dire dans une perspective d’auto-organisation, propriétaires d’usages de leur outil de travail

    Introduction

    Ce texte fait suite à de nombreuses discussions et à un atelier qui s’est déroulé lors d’une rencontre en sud-ouest.

    Pour précision, Réseau Salariat compte énormément d’adhérents ayant un lien fort avec l’éducation : enseignants, étudiants, chercheurs, éducateurs, sans compter les parents et élèves.

    Un certain nombre de travaux ont été fait, notamment la proposition de Salaire Étudiant [2] par Aurélien Casta.

    Au delà des propositions générales (nécessaires) sur une autre Éducation Nationale, et sur le recensement des pratiques alternatives (salutaires elles aussi), il manque la proposition d’un cadre macro social qui prolonge les analyses et proposition de Réseau Salariat.

    C’est la tentative de ce texte, qui est un premier jet et une première approche. Il est bien entendu incomplet, imprécis, critiquable et amendable. S’il suscite débat et contre-proposition, il aura remplis sa mission. :b

    État des lieux

    Si on prend le point de vue d’un individu « progressiste », on peut imaginer qu’à peu près tout dans l’éducation pose problème : hiérarchisation des élèves, raidissement réactionnaire, classisme, racisme,  sexisme, relation à l’ordre, mise en compétition, relation des enseignants à leur institution de tutelle (qui se fiche assez ouvertement d’eux),…

    On peut passer un roman à en décrire les turpitudes[3].

    Les institutions de l’éducation [4] en France ne me conviennent pas : petite enfance, primaire, collèges, lycées, supérieur. Leur état actuel, et encore moins les perspectives à venir. 

    On peut, d’un autre coté, considérer que l’Éducation reproduit le fonctionnement normal d’une institution étatisée, principalement capitaliste. Les récentes références à l’autorité (SNU, uniforme, contrôle des discours et débats…) s’inscrivent dans ses pratiques courantes. 

    Mais le propos n’est pas de faire la liste des problèmes, mais d’envisager des solutions, et en particulier des solutions macro sociales.

     Pour rappel, une économie capitaliste fonctionne sur 3 pilier principaux : le marché de l’emploi, la propriété lucrative et le crédit, géré par la classe capitaliste. Une économie communiste (comme mouvement réel de sortie du capitalisme), fonctionne avec : un salaire à la qualification attaché à la personne, une propriété d’usage, le financement par cotisation [5] , gérée par des institutions démocratiques.

     Proposition du Réseau Salariat : pour des sécurités sociales sectorielles [6]

    Ayant constaté dans la Sécurité Sociale, et son régime général, des institutions alternatives au capitalisme, il nous semble urgent de promouvoir une extension de ce déjà là, par des sécurités sociales sectorielles prolongeant les principes définis en 1946. Cela a permis un essor dans le domaine de la santé suivant des principes robustes : taux de cotisation unique, caisse unique et gestion démocratique.

    Il a fallu à la classe capitaliste plusieurs décennies pour détricoter ces principes, et faire reprendre en main par l’État (capitaliste) la gestion de la sécurité sociale, et la santé.

    Le recul démocratique sur la gestion de la santé s’explique, à notre sens, par un manque de forces et d’ambition à prolonger cette économie communiste dans d’autres filières, ainsi que l’approfondissement permanent d’une organisation démocratique en capacité de repousser les tentatives d’intrusion capitaliste.

    Par ailleurs, on peut aussi envisager de nombreuses évolutions par rapport au fonctionnement originel du régime général. Les fonctionnements d’institutions démocratiques seraient aujourd’hui différent (mandats impératifs, rotation des élus, mise en responsabilité de tou.te.s…).

    L’assiette de cotisation serait aussi différente, par exemple par une cotisation sur la valeur ajoutée. On pourra prolonger ces propositions économiques par les travaux du groupe Économie de Réseau Salariat (investissement, reconfiguration des institutions…).

    Proposition d’une sécurité sociale Sectorielle : Éducation

    Est-ce que Réseau Salariat peut proposer une Sécurité Sociale de l’Éducation, qui, avant de rentrer dans les détails, peut proposer un modèle macro-social :

    - de droit universel à l’éducation à la responsabilité économique et à l’émancipation

    - gérée démocratiquement (donc hors de l’État)

    - financée par cotisation sur la valeur ajoutée

    avec les premières questions :

    - Statut des Travailleurs ?

    - Statut de l’outil de travail ?

    - Statuts des Usagers ?

    - Les usagers ont-ils un droit de tirage sur l’Économie pour utiliser un service d’éducation ?

    - Si oui, ce droit de tirage doit-il être formalisé ?, et si oui, comment ?

    - Imbrication (ou pas) dans les autres secteurs économiques ?

    La Sécurité Sociale, dans son fonctionnement communiste, nous offre une multitude de solutions :

    - s’inspirer de ce qui existe déjà : la sécurité sociale, son régime général, et son application dans la santé, le statu de la fonction publique

    - s’appuyer sur ce déjà là et le généraliser à d’autres secteurs, avec des méthodes d’éducation populaires et la création de rapports de forces favorables.

    On peut, par exemple, envisager de regrouper sous une même banche de sécurité sociale les secteurs : petite enfance, maternelle, primaire, collège, lycée, enseignement supérieur, mais aussi périscolaire, enseignement professionnel, éducation populaire.

    source : https://www.education.gouv.fr/le-budget-et-les-finances-du-systeme-educatif-89252

    Remarque sur le schéma ci-dessus :

    - l’utilisation de moyennes permet de masquer habillement une énorme disparité géo-sociale.

    - le titre présente l’éducation comme un coût, nous le définissons comme une production.

    On peut actuellement constater une grande diversité d’organisation, du bénévole et du salarié indépendant (assistantes maternelles, école à la maison) aux plus grandes usines (2500 personnes), toutes actuellement conventionnées.

    La Sécurité Sociale permet déjà de conventionner des indépendants (libéraux de santé) et de grands collectifs (CHU). Il peut en être de même pour un système éducatif. On peut alors envisager des établissements d’enseignement variant en taille et en fonctionnement selon les besoins éducatifs, de proximité, …

    Pour les propositions de pédagogies à mettre en œuvre, je renvoie vers les études sur ces sujets. Les réflexions et expérimentations ne manquent pas.

    Je pars de l’hypothèse que si on libère les enseignants et élèves du carcan éducatif actuel, les  propositions de pédagogie seraient très différente d’aujourd’hui. Strictement, je ne sais pas quelle forme cela peut prendre. Mais il est possible d’envisager la généralisation des écoles libres, des pédagogies Freinet, des Pédagogies Institutionnelles, une libération du corps de enfants, la suppression d’une grande partie des « évaluations » et jugements, des activités épanouissantes et émancipatrices,… bref, d’envisager l’élévation des enfants dans une perspective collective.

    En première approche, cela concernerait principalement les enfants, et jeunes adultes. En effet, nous n’avons pas tous besoins d’être formé en permanence. C’est une étape d’acquisition de techniques et savoirs qui nous permettent d’envisager une activité professionnelle (y compris le métier d’enseignant).

    Autrement dit, dans une économie du Salaire à Vie, le temps éducatif est indispensable, mais ne donne pas droit à qualification, qui est du domaine de la reconnaissance de la responsabilité économique par les collectifs de travail. Ce n’est pas par ce que je valide des diplômes (certification) que je peux prétendre à un salaire plus élevé (qualification).

    Par ailleurs, la caisse de Sécurité Sociale doit veiller aussi aux conditions d’enseignements et d’études : mise à disposition de locaux adaptés, accès à des logements, à des cantines, des complexes sportifs, …

    La (ou les) caisse(s) sera géré selon l’échelle pertinente de manière démocratique. Là aussi, je renvoie aux travaux sur la démocratie pour définir les modalités d’organisation : quelle représentation dans les caisses, quelle échelle pertinente pour les caisses, modalités de décision, modalités de gestion des conflits, ….

    Nouveau modèle économique élaboré par Réseau Salariat en 2020 [7]

    Version simplifiée réalisée par le site Elucid

    L’éducation serait identifiée en Biens et Services  de production

    Modalités : proposition mise en débat

    Premièrement, on peut imaginer détacher les ministères concernés et les regrouper dans une branche de la Sécurité Sociale.

    Les instances de décision seraient démocratisées.

    L’impôt serait remplacé par une Cotisation sur la Valeur Ajouté de 10,5 %, (taux unique). L’organisation de l’enseignement peut être conservé en l’état dans un premiers temps, puis évoluer suivant les décisions collectives.

    Une autre version possible serait de traiter l’Éducation sur une proposition similaire à la Sécurité Sociale de l’Alimentation et la Santé, à savoir un droit de tirage économique sur une activité par une monnaie marquée.

    On pourrait envisager d’attribuer à tous une somme mensuelle de droit universel d’utilisation de services éducatifs. Suivant la moyenne par élève, partons pour 8400€ par ans, soit 700€ /mois. Cette somme s’utiliserait chez tous les professionnels conventionnés, dans une perspective d’auto-organisation, et dans une mission exclusive d’enseignement.

    Cette somme est une proposition, on peut envisager qu’elle soit insuffisante et qu’il faille augmenter fortement les moyens pour l’éducation.

    D’un point de vue fonctionnement, les activités conventionnés respecterons à minima : propriété d’usage des lieux et outils, salaire à la qualification des travailleurs. Comme pour le soin et l’alimentation, le conventionnement pourra s’appliquer à des travailleurs indépendants.

    Ces 700€/mois pourraient concerner tout le monde (y compris les mineurs), avec tout de même quelques critères d’organisation :

    - les montant attribués au mineurs pourraient être sous la responsabilité des responsables légaux jusqu’au 14 ans

    - L’universalité doit permettre de varier et enrichir les expériences professionnelles tout au long de la vie. Elle permet d’envisager une carrière dès que l’élève le souhaite, et autorise à reprendre des études à tout moment, suivant un rythme qui lui semblera le plus approprié

    - L’enseignement n’est pas une fin en soi (y compris pour la recherche), mais un moyen vers une activité professionnelle, dans une perspective de responsabilité économique.

    - le droit à la personne, à utiliser vers des professionnels conventionnés, doit permettre d’équilibrer le rapport élève/enseignant, et intégrer des formes de démocratie (comme les écoles libres)

    - La démocratie doit permettre de répondre au mieux aux besoins et aspirations des enfant/adolescent/étudiants, avec une incitation progressive à la responsabilité.

    Dans la mesure où nous sommes tous titulaire d’un salaire à la qualification (et pour rappel, la qualification n’est pas le diplôme), la montée en qualification pourrait ne pas tenir compte du parcours scolaire.

    Mise en œuvre : baston (c’est une métaphore)

    On peut envisager de s’appuyer sur les enseignants et leur statut (fonctionnaires principalement), donc reposant sur la qualification, pour subvertir l’institution.

    Cependant, le statut des enseignants ne suffit pas. La politique éducative reste de l’initiative du gouvernement, donc dans un carcan capitalise. Il manque donc pour envisager une démocratie dans l’enseignement une prise de contrôle sur l’outil et une modalité de son financement. Autrement dit, si on désire une autre éducation, il faut envisager une structure sociale hors de l’État capitaliste.

    Il faut simultanément une mobilisation des principaux intéressés, à savoir une majorité d’enseignants et de personnels accompagnants (administratif, entretient, cantines,…)

    Mais il faut en plus un large front syndical (éducation et hors éducation), de salariés (éducation et hors éducation), citoyens et associatifs (dans l’ordre de priorité de mobilisation).

    Pour mémoire, la construction du système de soin après guerre s’est faite grâce à la CGT et le Parti Communiste, contre les institutions en place (catholiques, ordre des médecins), et en partie contre les soignants présents.

    Pour résumer, on n’attend pas que les enseignants se mobilisent spontanément pour renverser les hiérarchies dont ils dépendent, mais on commence à créer les conditions pour un regroupement large et unitaire dans l’objectif de mise en place de nouvelles institutions, sur la base de modèles déjà existants.

    Et, pour point d’attention, la bataille peut être saignante. 10 ,5 %, de cotisation sur la Valeur Ajoutée, c’est énorme. De même, contester les principes patronaux est un casus belli. Le patronat ne va pas être content. On peut envisager qu’il ne va pas se laisser faire. On peut même concevoir qu’il risque de procéder comme chaque fois qu’il est contesté, à savoir envoyer les forces de répression, y compris dans les écoles pour violenter des enfants.

    Ce sera donc notre niveau d’organisation et la puissance de notre collectif qui fera que l’état soit tenté (ou pas) d’utiliser des forces de répression violentes.

    Il est urgent d’envisager mieux pour nos enfants. Envisageons une éducation à la co-responsabilité dès maintenant !

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    Sources documentaires (une très courte sélection)

    - Paroles D’Honneur - L’école au cœur du projet raciste et réactionnaire ? avec François Bégaudeau, Dany, Yazid et Wissam

    https://www.youtube.com/watch?v=KDeoqH7AuII&ab_channel=ParolesD%27Honneur

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     PPS : 528 fautes sont cachées dans ce texte : trouve-les et propose une abolition de l’ortaghrophe

    (qui est, parmi d’autres, du classisme)


    [1] La Sécurité Sociale fait ici référence à l’institution mise en place en 1946 par la CGT et le parti Communiste, contre les institutions patronales et étatiques

    [2] https://www.reseau-salariat.info/dossiers/salaire_etudiant/

    [3] Par exemple : lundi.am, le 2 août 2019, De la misère en milieu enseignant

    [4] que l’on nommera par facilité Éducation

    [5] pour une proposition plus complète d’une économie communiste, voir les travaux du groupe Économie de Réseau Salariat. Le groupe Économie nous alerte en particulier sur l’investissement, qui reste une aliénation sur le travail.

    [6] Voir la vidéo d’introduction au séminaire de Réseau Salariat sur la proposition de Sécurité Sociale de la Culture : https://www.reseau-salariat.info/videos/2022-10-24/

    [7] Article - Une monnaie communiste ?  Groupe Thématique Économie de Réseau Salariat

    https://www.reseau-salariat.info/articles/2021-11-21/

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